Acta fabula
ISSN 2115-8037

2002
Printemps 2002 (volume 3, numéro 1)
titre article
Jean-Baptiste Mathieu

La littérature a-t-elle quelque chose à dire à la philosophie?

Philippe Sabot, Philosophie et littérature. Approches et enjeux d'une question, Presses Universitaires de France : collection « Philosophies », 2002.

1Supposons que vous vous rendiez dans une bibliothèque, et que vous demandiez à un (bon) bibliothécaire : « Pourriez‑vous me trouver un livre qui traite de la structure de la réalité ? », ou bien « Pourriez-vous me trouver un livre qui dise quelles sont les vérités morales ? » Selon toute probabilité, celui‑ci, pour satisfaire votre demande, se dirigera non vers le rayon « romans » ou le rayon « poésie », mais vers le rayon « philosophie ». Si, par contre, vous lui demandez : « Pourriez‑vous me trouver un livre qui sollicite le goût et l'imagination ? », il se contentera sûrement de vous désigner le rayon « romans » ou le rayon « poésie » en vous disant « Voyez vous‑même », mais ne vous indiquera pas l'emplacement des œuvres complètes de Kant.

2C'est cette division du travail entre philosophie et littérature — à l'une la tâche de dire le vrai, à l'autre celle de divertir et de plaire — que conteste Philippe Sabot dans l'essai qu'il vient de consacrer à leurs rapports, et qui s'intitule Philosophie et littérature. Approches et enjeux d'une question. Selon Philippe Sabot, la littérature, aussi bien que la philosophie, participe de la pensée — de même que la philosophie, aussi bien que la littérature, est une certaine forme de pratique langagière. Il met en cause le partage « essentialiste » entre deux entreprises distinctes — la philosophie et la littérature — déterminant deux ensembles étanches de textes, partage qui aurait « pour corrélat un certain effacement du travail des textes eux-mêmes, tel qu'il affleure dans leur agencement complexe où peuvent s'entremêler, selon des modalités très variées et à chaque fois singulières, une certaine "dimension " philosophique et une certaine " dimension " littéraire " » (p. 11). Pour Philippe Sabot, il y a dans les textes littéraires matière à susciter l'intérêt des philosophes, voire même de quoi les amener à questionner leurs propres pratiques. D'où la question suivante : « comment concevoir une pratique philosophique des textes littéraires qui fasse droit à la pratique " littéraire " de la pensée et qui se fonde sur elle ? » (p. 12) — autrement dit, comment dégager la pensée à l’œuvre dans les textes littéraires en tenant pleinement compte de leurs spécificités formelles. Elle conduit Philippe Sabot à choisir, dans l'ensemble des commentaires que des philosophes ont consacrés à des œuvres littéraires, un certain nombre de travaux selon lui caractéristiques de « différents types d'approches philosophiques de la littérature » (ibid.), afin de les définir et de tracer ainsi « le cadre problématique et théorique d'une sorte de philosophie de la littérature » (ibid.) qui frappe de caducité le partage traditionnel entre ces deux domaines.

La littérature, « fantôme dans le placard » de la philosophie 

3Avant d'entamer son entreprise typologique, et afin de « remettre en perspective cet intérêt que les œuvres de la littérature semblent susciter, tout particulièrement de nos jours, chez les philosophes » (p. 14), Philippe Sabot fait l'historique des rapports contrastés de la philosophie et de la littérature. Alors qu'avec les présocratiques — Héraclite, Parménide, Empédocle — « il semble bien que (…) la communication philosophique ait paru indissociable de sa mise en œuvre poétique » (p. 17), avec Platon — notamment dans La République — le poète n'est plus qu'un fabricant d'illusions, et l'établissement de la vérité devient l'apanage du seul philosophe et de « la pensée discursive (la dianoïa) » (p. 15). Pourtant, les limites de cette dernière conduisent Platon à recourir « pour dire le principe même du pensable (…) à des images, à des métaphores (celle du soleil est sans doute la plus fameuse), ou encore à des mythes, soit précisément aux ressources traditionnelles des poètes et des littérateurs qu'il condamne » (ibid.). Après Platon, qui instaure donc, non sans dénégation de sa propre pratique, la séparation de la poésie et de la philosophie, vient Nietzsche, qui la remet en cause en pratiquant la philosophie « en artiste », en contestant la prééminence de la vérité sur l'illusion, en refusant de se soumettre inconditionnellement aux exigences de cohérence et d'argumentation propres à la philosophie, en écrivant des aphorismes et des textes de nature poétique plutôt que des ouvrages dogmatiques. Le geste nietzschéen — écrire de la philosophie avec des préoccupations esthétiques, valoriser le fabricant d'illusions qu'est l'artiste contre le chercheur de vérité que se veut le philosophe — est poursuivie et radicalisé par Jacques Derrida qui, selon Philippe Sabot, a salué en Nietzsche celui qui, « en introduisant un soupçon quant à la valeur de l'opposition philosophique entre vérité et illusion, engage un rapport critique à cette valeur de vérité dont la métaphysique s'attache à dissimuler, dans ses textes, la provenance artificieuse, rhétorique ou métaphorique » (p. 21). L'entreprise philosophique de Jacques Derrida consiste en effet, pour Philippe Sabot, à ramener au jour l'origine métaphorique, tropique des concepts philosophiques, à rappeler à la philosophie ce qu'elle doit nier pour accéder à l'autonomie disciplinaire : son enracinement dans le langage et ses jeux. « Déconstruire » la philosophie, comme s'y emploie Jacques Derrida, c'est faire de la littérature « l'impensé de la philosophie » (p. 31) ; c'est défaire le partage platonicien en ébranlant notre confiance dans la capacité du langage à produire autre chose que des effets et des fictions.

4Avec Jacques Derrida, la philosophie se trouve donc pour ainsi dire « investie » par la littérature. Mais la déconstruction laisse en suspens, selon Philippe Sabot, la question de la présence de la philosophie dans la littérature, et des formes que prend cette présence. La typologie des analyses philosophiques de la littérature qui constitue la majeure partie de son livre vise à sa résolution.

Typologie critique des analyses philosophiques de la littérature

5Philippe Sabot distingue trois grands « schèmes » d'analyse ou de commentaire philosophique de la littérature : le schème didactique, le schème herméneutique, et le schème productif.

6Dans le schème didactique (une expression empruntée au Petit Manuel d'inesthétique d'Alain Badiou, Le Seuil, 1998), le texte littéraire est étudié selon des concepts et des perspectives qui lui sont extérieurs, déterminés par le philosophe qui l'analyse, et dont il ne constitue que l'illustration ; la spécificité formelle des textes littéraires est laissée de côté. Pour Philippe Sabot, l'ouvrage de Gilles Deleuze consacré à La Recherche du temps perdu et intitulé Proust et les signes, est représentatif des analyses philosophiques d’œuvres littéraires conduites selon le schème didactique : Deleuze y lit le roman de Proust à la lumière de concepts propres à sa philosophie, dont le roman lui permet de préciser la formulation, sans prêter attention aux possibles significations spéculatives de la forme romanesque. Du roman de Proust dans le commentaire qu'en donne Deleuze, Philippe Sabot demande : « Tout en étant sollicité comme la source de ses propres interprétations, celui-ci ne vaut-il pas pourtant seulement comme le " négatif " d'une théorie qui le dépasse en le révélant à lui-même et qui, à la limite, tire sa pertinence de ses propres enchaînements conceptuels — et non directement du travail romanesque (p. 51) ? »

7À première vue, le schème herméneutique semble surmonter les défauts du schème didactique. Dans le schème herméneutique, en effet, « la littérature peut légitimement être considérée comme le lieu d'une révélation essentielle, c'est‑à‑dire qu'elle recèle une vérité philosophique qui la traverse et qui constitue le fond — ou l'arrière‑fond — de ses textes " (p. 55) : dans le schème herméneutique, la littérature recèle des vérités philosophiques qu'elle seule est à même de faire apparaître. Toutefois, « il revient (…) à l'interprétation de ressaisir ou de dévoiler cette signification implicite de l'oeuvre en remontant jusqu'au noyau spéculatif où s'origine sa vérité » (p. 56). Et c'est là que le bât blesse à nouveau : dans le schème herméneutique comme dans le schème didactique, le commentaire ou l'interprétation dégage du texte littéraire un contenu spéculatif dont l'expression littéraire n'apparaît plus que comme accessoire — comme s'il ne pouvait y avoir de « pensée de la forme ». L'exemple qu'analyse ici Philippe Sabot est celui du commentaire que donne Paul Ricoeur, dans le deuxième tome de Temps et récit (Le Seuil, 1984), de La Recherche du temps perdu, de La Montagne magique de Thomas Mann, et de Mrs Dalloway de Virginia Woolf. Selon Paul Ricoeur, ces trois œuvres manifestent de façon exemplaire la capacité du roman à exprimer positivement les aspects de notre expérience temporelle que le discours philosophique ne parvient à approcher qu'en termes aporétiques. Mais ce que Philippe Sabot reproche à Paul Ricoeur, c'est justement de déterminer la portée philosophique de ces trois œuvres à partir des apories du temps telles que les expriment les philosophes, donc de l'extérieur des œuvres, et indépendamment d'une interrogation sur la spécificité de leur forme et de la forme romanesque.

8Dans le schème didactique comme dans le schème herméneutique, les passages explicitement spéculatifs des œuvres littéraires – autrement dit, ce qui dans ces œuvres est le plus extérieur à la littérature — orientent l'interprétation philosophique de celles‑ci. Dans le schème productif, dont l'exemple donné par Philippe Sabot est le livre de Vincent Descombes Proust. Philosophie du roman (Minuit, 1987), ce privilège tombe. Il ne s'agit plus de « montrer comment un texte littéraire dérive d'une philosophie » (p. 97), mais comment un texte, dans et par sa forme, « produit » une certaine pensée. Dans son analyse de La Recherche du temps perdu, Vincent Descombes propose justement de ne pas lire le roman de Proust comme l'illustration de ses passages spéculatifs ou du Contre Sainte-Beuve, mais plutôt de chercher quels sont les contenus philosophiques que la forme romanesque est à même de révéler. Dans le schème productif, les philosophes ne détiennent pas a priori la vérité philosophique des textes qu'ils commentent ; ils n'en sont que les accoucheurs : « loin que (les textes littéraires) reçoivent leur propre vérité de la philosophie, il faut dire plutôt qu'ils adviennent à certaines vérités par l'entremise de la philosophie » (p. 96).

Philosophie de la littérature

9Dans le prolongement de son analyse du schème productif, qui définit les conditions auxquelles une lecture philosophique des textes littéraires qui rendent justice à leur « potentiel » spéculatif est possible, Philippe Sabot se demande « quelles sortes de vérités » (p. 100) la littérature est susceptible de produire. Pour répondre à cette question, il entreprend l'analyse de deux études philosophiques de textes littéraires : la lecture de Cap au pire, de Samuel Beckett, proposée par Alain Badiou dans Petit Manuel d'inesthétique ; la lecture de l'oeuvre de Raymond Roussel donnée par Michel Foucault dans son Raymond Roussel (Gallimard, 1963). Le texte de Beckett, ainsi que le note Philippe Sabot, « se présente lui-même comme une méditation à caractère spéculatif » (p. 101) ; les oeuvres de Roussel sont quant à elles de nature ludique. Il s'agit donc apparemment d'objet rigoureusement dissemblables ; tout l'intérêt de l'analyse, selon Philippe Sabot, sera justement de montrer qu'en dépit de leurs différences, ces textes révèlent un contenu spéculatif analogue qui pointe vers une philosophie de la littérature, autrement dit, vers la ou les vérité(s) philosophiques qu'exprime la littérature en tant qu'elle est une certaine pratique du langage. Et pour Philippe Sabot, les analyses de Beckett par Badiou et de Roussel par Foucault montrent que les analyses philosophique de textes littéraires menées en fonction du schème productif tendent à la conclusion suivante : « la littérature, dans ces textes apparemment les plus opposés, énonce en quelque sorte sa propre vérité, à savoir qu'au fond du langage (c'est‑à‑dire à son fondement même), il y a une béance ontologique, par laquelle ce que nous disons n'adhère pas complètement aux choses dites mais libère au contraire en elles un espace vide sur lequel s'édifie tout discours » (p. 118). L'intérêt pour la philosophie de cette « vérité de la littérature » est alors le suivant : relativiser la portée, la prétention à la vérité des discours que les philosophes tiennent sur le monde, puisque leur vecteur est ce même langage dont l'emprise sur le réel est si fragile.

Lecture critique

10Le livre de Philippe Sabot appelle un certain nombre de critiques d'ensemble et de détail, concernant notamment : 1/ la cohérence du parcours qu'il propose au lecteur ; 2/ sa façon d'envisager les opérations de commentaire ou d'interprétation des textes littéraires ; 3/ son utilisation de l'ouvrage de Vincent Descombes consacré à Proust et, au-delà, sa façon d'envisager l'analyse philosophique de la littérature indépendamment de la question des genres littéraires.

111/ Il y a pour ainsi dire deux livres en un dans Philosophie de la littérature : une « épistémologie » de l'analyse philosophique des textes littéraires ; une ébauche de définition de la philosophie de la littérature, ou de la vérité philosophique qu'exprimerait la littérature — autrement dit, une analyse méthodologique et l'affirmation d'une thèse substantielle sur le propos de la littérature, elle-même liée à une certaine philosophie du langage. Ce sont deux choses très différentes, et souscrire aux principes méthodologiques qui définissent le schème productif — attention à la spécificité formelle des textes et refus de privilégier les passages explicitement spéculatifs — ne conduit pas nécessairement à souscrire à la philosophie de la littérature proposée in fine par Philippe Sabot. Or, c'est ce qu'induit le déroulement du livre. En outre, cette philosophie de la littérature, qui rabat la question de la littérature sur celle du langage, ne méconnaît-elle pas justement la spécificité des formes littéraires et des œuvres ? Ne s'appuie‑t‑elle pas sur des textes très particuliers, et pourrait-elle valoir pour d'autres œuvres que celles qui définissent le canon de la « modernité littéraire » ? N'est‑elle pas plus essentialiste encore que la séparation traditionnelle entre philosophie et littérature — qui ne définit pas la littérarité par un contenu mais par une fonction (esthétique), susceptible de s'associer à plus d'un contenu, et d'être « attribuée » à des textes a priori hors du canon de la littérature (je renvoie sur ce point à Gérard Genette, Fiction et diction, Le Seuil, 1991) ?

122/ Philippe Sabot reproche à bon nombre d'analyses philosophiques d’œuvres littéraires de négliger la spécificité formelle de ces oeuvres et sa participation à la production d'un contenu spéculatif, de sorte que l'expression littéraire de ce contenu, une fois celui-ci « traduit » en langage philosophique, apparaît comme accessoire. Soit Philippe Sabot reproche à ces analyses de négliger la contribution des traits formels des oeuvres à la signification, ou de leur appliquer des schèmes d'interprétation qui conduisent à une telle négligence, et son reproche est recevable ; soit il se réfère à « la thèse de l'inséparabilité de la forme et du contenu » (Roger Pouivet, compte‑rendu de Peter Kivy, Philosophies of arts, dans les Cahiers du Musée national d'art moderne, n° 63, printemps 1998, p. 117), comme il est permis de le soupçonner à plusieurs moments de son propos, et il faudrait alors que soit précisé ce qu'il entend par la prise en compte des « effets » philosophiques de la forme dans l'analyse philosophique des textes littéraires et dans la détermination de leur contenu spéculatif. Car si les oeuvres littéraires expriment des vérités philosophiques autrement que dans leurs parties explicitement spéculatives, la mise au jour de ces vérités par l'analyse aboutira à un discours sensiblement différent de ce qu'est l'oeuvre commentée — autrement dit, à une série de propositions exprimant ces vérités (je renvoie sur ce point à la dernière partie de Jacques Bouveresse, « Fait, fiction et diction », dans les Cahiers du Musée national d'art moderne, n° 41, automne 1992, p. 15‑32).

133/ Dans son analyse de la démarche adoptée par Vincent Descombes tout au long de son Proust. Philosophie du roman, Philippe Sabot ne tient pas suffisamment compte de l'insistance de Descombes sur les questions de genre. Descombes critique les théoriciens « textualistes » de la littérature qui, tels, selon lui, Barthes ou Foucault, réduisent celle-ci à n'être que la manifestation du langage. Il souligne combien la recherche d'une essence de la littérature s'avère délicate dès lors que l'on tient compte des distinctions génériques : « Mais qu'y a-t-il de commun à tous les écrits ? Tant qu'on distingue des genres littéraires, il est difficile de répondre » (Proust. Philosophie du roman, p. 97). Et ce n'est pas pour rien qu'il sous‑titre son livre « Philosophie du roman » : il cherche à déterminer l'intérêt philosophique de la forme romanesque, non la ou les hypothétiques vérité(s) philosophiques que les romans exprimeraient conjointement avec l'ensemble des oeuvres littéraires. Cet intérêt, il le voit notamment dans la capacité du roman à traduire les concepts psychologiques et moraux usuels en situations qui sont autant d'analyses de ces concepts — la spécificité du roman n'est donc pas seulement d'ordre linguistique. Une « idée de roman » (expression qu'il ne faut pas comprendre comme « pensée exprimée par un roman »), c'est une idée susceptible d'être développée sous la forme d'un agencement de relations entre des personnages et d'actions. Il est peu probable qu'une bonne « idée de roman » soit une bonne « idée de poème » (on trouvera une intuition forte de l'importance des différences génériques dans l'appréciation de la portée spéculative des œuvres littéraires chez Milan Kundera, L'Art du roman, Gallimard, 1986).

14L'insistance de Vincent Descombes sur la spécificité du roman le conduit d'ailleurs à « limiter » son intérêt philosophique à une branche particulière de la philosophie, la philosophie morale : « Les philosophes ont le plus grand besoin de lire des romans s'il est vrai que la forme romanesque est aujourd'hui la plus riche (…) en échantillon de ces manières communes de penser qui sont la matière première de la philosophie pratique » (Proust. Philosophie du roman, p. 18). C'est une idée que l'on retrouve chez la philosophe américaine Martha Nussbaum, pour qui l'intérêt philosophique du roman, en tant qu'il est une représentation de la vie humaine par le biais de la représentation d'existences singulières, est de fournir à la philosophie morale le matériau pour une analyse plus juste de l'expérience morale (voir, à ce sujet, son article « Flawed Crystals : James's The Golden Bowl and literature as moral philosophy », dans New Literary History, John Hopkins UP, vol. XV, automne 1983, n° 1, p. 25‑50). Il me semble que Descombes et Nussbaum proposent une vue plus convaincante de l'intérêt philosophique du roman que celle que l'on peut dégager du propos de Philippe Sabot, dans la mesure même où elle est étroitement liée aux particularités du roman.

15Ces quelques critiques faites, on ne peut que souscrire à la volonté manifestée par Philippe Sabot de ne pas cantonner la littérature au domaine du plaisir et du divertissement, et de faire reconnaître sa participation à la connaissance. Mais la prise en compte pleine et entière de ses aspects réflexifs et cognitifs, et la réévaluation de son statut qui en découle, exige sans doute de recourir, à la suite de Nelson Goodman, à un concept de connaissance qui intègre davantage de modalités de notre appréhension du monde que la seule connaissance propositionnelle qui est le propre de la philosophie (je renvoie à nouveau sur ce point à la dernière partie de l'article de Jacques Bouveresse précédemment cité).