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Mémoire des origines et construction mémorielle : l’exemple de Jacques Rabemananjara à Madagascar

Mémoire des origines et construction mémorielle : l’exemple de Jacques Rabemananjara à Madagascar

Publié le par Marc Escola (Source : universités de Lorraine et de Toamasina (Madagascar))

Université de Lorraine (Metz) Université de Toamasina (Madagascar)

6 et 7 septembre 2018

Colloque international de Toamasina

 

Mémoire des origines et construction mémorielle : l’exemple de Jacques Rabemananjara à Madagascar

Chaque communauté, nationale en particulier, se constitue à partir d’une mémoire partagée (Renan, Thiesse) constituée par diverses instances, institutionnelles (histoire officielle) ou non (la tradition et ses réécritures), et parfois par les acteurs invividuels eux-mêmes (entretiens, mémoires, littérature). Cette construction mémorielle, qui peut prendre la forme d’une « fabrication des héros », peut varier au fil du temps et des lieux, en fonction du climat politique, ou encore de la réception ou non des œuvres.

Le colloque international de Toamasina se propose d’examiner ces processus à propos du cas de Jacques Rabemananjara (1913-2005), natif de cette région de la Côte Est de Madagascar, qui fut à partir de 1945 député, puis, après l’indépendance, ministre et maire de la ville. Cette carrière politique fut menée en parallèle avec un engagement poétique.

Jacques Rabemananjara est resté dans les mémoires de manière fort contrastée, tantôt comme poète lyrique, tantôt comme responsable politique. À l’issue d’un séjour en France de 1939 à 1946, il fut élu député français de Madagascar en 1946, et siégea au bureau national du mouvement nationaliste malgache MDRM dès sa fondation. Arrêté lors de l’insurrection de mars 1947, il fut condamné à perpétuité par la justice coloniale, et emprisonné pendant 9 ans. Il occupa des fonctions ministérielles depuis l’indépendance en 1960 jusqu’à la révolution de 1972 (économie, agriculture, affaires étrangères). Ses engagements, sous la colonisation française jusqu’à 1945, pendant la montée en puissance du MDRM en 1946-1947 puis après sa sortie de prison en 1956, semblent à la fois fidèles à une même exaltation de la nation malgache et différents dans leur mise en pratique.

Se référant à des figures emblématiques fortes comme l’écrivain Rabearivelo, dont il peut revendiquer la filiation littéraire, et le militant anticolonialiste vietnamien Ho-Chi-Minh, il a défendu ses positions en français dans sa Revue des jeunes de Madagascar dès 1935, dans son œuvre littéraire poétique et dramaturgique et dans ses écrits issus des conférences données dans les années 1956-1958.

En France où il a donné de nombreux entretiens au cours de son exil (1973-2005), il est surtout connu pour sa carrière littéraire à l’ombre de ses amis Senghor, poète et homme politique qui fit jouer son influence en sa faveur, et Alioune Diop, fondateur de Présence africaine. Il a marqué l’histoire littéraire occidentale par son engagement à leurs côtés en faveur de la négritude, en particulier lors des Congrès des écrivains et artistes noirs (1956 et 1959). Inversement, à Madagascar, c’est sa carrière politique qui marque davantage les mémoires, alors que son œuvre littéraire est introuvable.

Cependant, sa place dans l’histoire littéraire et politique malgache et francophone semble à la fois incontournable et assez floue pour que sa consécration demeure indiscutable. En conséquence, il représente à la fois la figure d’un héros nécessaire à la construction d’une mémoire nationale et le symbole d’un nationalisme aux formes contestées.

Le colloque international de Toamasina, clairement interdisciplinaire, a pour objectif d’examiner comment un tel personnage aux multiples engagements a pu donner lieu à diverses constructions mémorielles. Il s’agira de croiser les analyses issues de tous les domaines dans lesquels Jacques Rabemananjara a exercé ses talents : littérature, relations internationales, luttes anti-coloniales, politique intérieure malgache.

On s’interrogera par exemple sur sa poétique et ses liens avec les autres écrivains malgaches, français (en particulier les écrivains coloniaux tels que Robert Boudry) et africains (dont tous ceux qu’il a côtoyés au sein de l’équipe de Présence Africaine). On s’intéressera aussi à ses engagements politiques et culturels en France et à Madagascar, de même qu’à ses initiatives d’envergure internationale, au sein du panafricanisme et des relations bilatérales entre Madagascar et, par exemple, l’Afrique du Sud ou Israël. Les analyses mettront donc l’accent tantôt sur les idées, tantôt sur les stratégies, ou encore sur la création langagière. L’analyse de l’image qu’il a lui-même construite et des diverses mémoires (dans sa région, dans les diverses classes politiques malgaches, en France) prendra appui aussi bien sur les sources écrites que sur les enquêtes menées sur le terrain.

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Diverses activités avant et pendant le colloque contribueront à redonner de la visibilité à l’homme et à son œuvre dans sa ville d’origine :

Dans les mois qui précéderont le colloque, les œuvres de Jacques Rabemananjara seront étudiées par les étudiants de Lettres et sa place dans l’histoire politique sera abordée par les étudiants d’histoire. Tous ces étudiants (environ 200) seront invités à assister aux débats.

Des étudiants des clubs du proche lycée Jacques Rabemananjara et de l’université travailleront à la mise en scène et/ou en voix  de textes en vue d’un grand spectacle public auquel participera le « Bemananjara orchestra », issu de Maroantsetra, ville natale de Rabemananjara  animé par des membres de sa famille.

Une exposition, conçue par Dominique Ranaivoson pour l’IFM d’Antananarivo en 2015, sera présentée sur le campus et dans le lycée quelques semaines avant le colloque.  

Dans la perspective de redonner accès à son œuvre aux Malgaches, une anthologie de ses principaux textes pourrait être publiée et diffusée pendant le colloque (en fonction de la collaboration avec Présence Africaine).

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Les propositions de communication pourraient être organisées autour de différents axes :

— La poétique de Rabemananjara

— La République de Madagascar représentée par Rabemananjara : les relations multilatérales et bilatérales.  

— Les modèles et compagnons de Rabemananjara : Rabearivelo, Ho-Chi-Minh, Senghor, Alioune Diop, Albert Rakoto-Ratsimamanga…

— La représentation de Rabemananjara au fil des époques et des idéologies, en France, en Allemagne et à Madagascar.

— Rabemananjara et les langues.

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Comité scientifique :

Lucile Rabearimanana (Université d’histoire, Antananarivo)  

Solofo Randrianja (Université d’histoire, Toamasina))

Liliane Ramarosoa (Lettres françaises, ENS Antananarivo)

Daniel Delas (Cergy-France)

Ranaivoson Dominique (MCF-HDR littératures comparées, université de Lorraine)

 

Comité d’organisation :

Toto Chaplain (chef du département d’histoire, université de Toamasina)

Randrianantenaina Joël (chef du département de Lettres, université de Toamasina)

Ranaivoson Dominique (MCF-HDR littératures comparées, université de Lorraine)

 

Autres institutions locales partenaires :

Lycée Jacques Rabemananjara, Toamasina

Mairie de Toamasina

Institut français de Madagascar, Antananarivo

 

Calendrier :

Juin 2017 : lancement de l’appel à communications

31 octobre 2017 : Fin de la réception des propositions

1er décembre 2017 : Avis aux participants