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Écarts et variations : l’instabilité du multiple (Saint-Étienne)

Écarts et variations : l’instabilité du multiple (Saint-Étienne)

Publié le par Romain Bionda (Source : CIEREC Université Jean Monnet Saint Etienne)

Écarts et variations : l’instabilité du multiple dans les arts aujourd’hui

Suite à la journée d’étude Copies et réemplois, organisée à Saint-Étienne en 2018, nous souhaitons poursuivre nos recherches sur l’œuvre multiple en envisageant l’instabilité de sa production, de sa reproduction et de sa diffusion. Cette approche de la création contemporaine reste ouverte et transdisciplinaire, elle concerne essentiellement les arts plastiques, le design mais aussi les arts du spectacle, les musiques actuelles et les lettres modernes.

Cette troisième journée d’étude sera l’occasion d’analyser des productions artistiques qui manifestent, interrogent et mettent en œuvre, sur le mode du multiple, l’écart et la variation à l’égard de leur modèle. Les modèles, pour reprendre les terminologies de Goodman et Genette, peuvent être des matrices ou des prototypes pour des reproductions autographiques multiples, ou encore des programmes ou des notations, pour des multiplications allographiques. Il s’agira d’étudier les propriétés contingentes de manifestations artistiques qui à travers écarts et variations produisent des multiples non similaires et donnent lieu à des reprises distanciées et uniques ainsi qu’à des reformulations. Nous observerons comment certaines œuvres contemporaines, qu’elles relèvent de la réplique, de l’empreinte, du tirage, ou de l’exécution et de la réactivation, s’émancipent de leur modèle qu’elles convoquent conjointement. Comment se revendiquer autre tout en étant issu du même ?

Concernant des productions autographiques multiples, bien qu’issues d’une même matrice, des œuvres peuvent être conçues pour s’écarter de l’emprise de leur origine matricielle pour devenir pièces originales.

En design, ces opérations peuvent tendre vers une esthétique du « raté », valorisant les défauts et les imperfections généralement rejetés par la production industrielle (5.5 designers, projet Ouvriers-designer, entreprise Bernardaud). Ces productions, dans la lignée des processus de différenciation travaillés par Gaetano Pesce avec ses fameuses Pratt chair, remettent en cause de manière critique la conformité et la tyrannie de l’uniformité. Elles corrompent les opérations de productions et subvertissent les formes et les usages. Si les techniques traditionnelles du moulage peuvent être au cœur de cette perturbation opératoire, les technologies liées à l’impression 3D peuvent également introduire, voire programmer des imperfections, contrecarrant la réplication sans écart.

La recherche d’une subversion de l’autorité de la matrice encourage des mises en forme instables et la production de corps de rechange à la fois multiples et uniques.

En arts plastiques, il peut s’agir d’exploiter jusqu’à épuisement une matrice (en gravure par exemple) à travers une esthétique de l’écart, de la variation, voire de l’accident, qui met à distance la relation indicielle au modèle. Certaines œuvres peuvent aussi s’inspirer des dispositifs de chaine de production industrielle pour produire mécaniquement et en série, des formes aléatoires et autonomes qui subvertissent leurs mises en forme idéales (Roxy Paine avec Scumak 1 et 2, Etienne Bossut avec ses objets moulés…).

Les arts performatifs qui oscillent entre régime autographique et allographique nous semblent également intéressants à questionner à l’aune des notions d’écart et de variation.

Nous pensons aux pratiques de re-enactement qui reproduisent et réactualisent des évènements antérieurs, comme des performances déjà jouées mais aussi des expositions célèbres (Harald Szeemann, When attitudes become forms 1969, biennale de Venise  2013). Il s’agira de voir comment le re-enactement met en tension fantasme de similarité et écart recontextualisé, tout en devenant un nouvel espace d’appropriation et de création. Des réactivations ou réexécutions qui peuvent également provenir de systèmes de notation, comme c’est le cas avec l’artiste Emilie Parendeau qui s’approprie et active des définitions programmatiques écrites par d’autres.

Du point de vue des arts de la scène, évoquons aussi la pièce chorégraphiée Même, écrite par Pierre Rigal, qui met en abyme l’écart à l’œuvre dans la re-présentation des arts performatifs puisqu’il s’agit d’enchainer dans un rythme effréné des boucles approximatives et des « duplications erronées ».

 

Dans le cadre de cette journée d’étude, ces différentes pistes peuvent être abordées :

La production de multiples non similaires : faire de l’autre avec du même

La valorisation des rebuts et des ratés 

De la dégradation à l’épuisement de la matrice : vers une critique de l’autorité indicielle

De la réexécution à la trahison dans le re-enactement

L’instabilité de l’itération dans les arts performanciels et allographiques

Mais d’autres propositions liées aux écarts et variations de l’œuvre multiple peuvent être étudiées.

 

 

Modalités : proposition de communication faisant apparaître clairement le titre et l’approche abordée (environ 300 mots) et une courte notice biographique sont à faire parvenir à celine.cadaureille@univ-st-etienne.fr et anne.favier@univ-st-etienne.fr avant le 3 septembre 2018.

Lieu : Université Jean Monnet de Saint-Étienne, département d’Arts plastiques, site Denis Papin.

Date de la journée d’étude : 29 novembre 2018