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Exogenèse/Intertextualité (revue Genesis)

Exogenèse/Intertextualité (revue Genesis)

Publié le par Marc Escola (Source : Céline Gahungu)

Appel à contributions

EXOGENÈSE/INTERTEXTUALITÉ

Genesis, n°51, novembre 2020.

Publiée par Sorbonne Université Presses et par voie numérique (https://journals.openedition.org/genesis/), la revue Genesis est spécialisée en critique génétique.

Numéro thématique dirigé par Pierre-Marc de Biasi et Céline Gahungu.

Pour sa 51ème livraison, Genesis s’intéressera au concept d’exogenèse qui reformule, en termes génétiques, la notion d’intertextualité. Pour les généticiens, l’exogenèse désigne, dans l’avant-texte – ou l’avant-œuvre –, tout processus de création consacré à un travail de recherche, de sélection et d’intégration portant sur des informations (documentaires, référentielles, autobiographiques, littéraires, stylistiques, etc.) émanant d’une source extérieure à la conception et à la réalisation proprement dites de l’œuvre. L’exogenèse s’oppose dialectiquement à l’endogenèse conçue comme démarche créatrice centrée sur l’élaboration de l’écriture – ou de l’œuvre – par elle-même, en tant qu’elle ne mobilise que ses propres ressources pour se réaliser.

Argumentaire

Né il y a une cinquantaine d’années, le concept d’intertextualité a une histoire assez proche de celle de la critique génétique : son développement et ses métamorphoses se sont accomplis parallèlement à ceux de notre discipline avec, dès les années 1980, l’apparition de zones de contact qui se sont traduites par la construction d’un débat et de véritables complémentarités entre intertexte et avant-texte. Tandis que les généticiens multipliaient les recherches sur d’importants gisements d’archives rédactionnelles, documentaires et biographiques, qui jetaient une lumière nouvelle sur les « sources » et sur leur intégration par l’écriture, l’outillage conceptuel de l’intertextualité bénéficiait des avancées théoriques et des clarifications terminologiques opérées par Gérard Genette. Dans le même temps, pour ses propres besoins, la génétique tentait d’élaborer, sur mesure, des outils notionnels capables de rendre raison des phénomènes temporalisés qui animent les processus intertextuels à l’échelle de l’avant-texte.

Ces avancées, de part et d’autre, n’ont fait que rendre plus sensible la différence des points de vue, la génétique se situant du côté des causalités de l’écriture, et l’intertextualité du côté des effets de lecture. Pour les généticiens, si l’intertextualité reste démunie pour juger des réelles relations que l’œuvre entretient à son intertexte, c’est parce qu’elle se représente l’écriture comme un résultat et non comme un processus, en ne considérant que le texte final et sa réception. Son objet d’étude est l’étendue et le volume d’un déjà-publié qui permettrait d’identifier ce que chaque nouvelle œuvre doit à l’univers des textes antérieurs ou contemporains qui ont pu l’informer, ou vis-à-vis desquels il se situe – implicitement ou explicitement – en relation de dialogue, de similarité, de suggestion ou de cosignifiance.

Mais comment en juger si l’on se place du seul point de vue du livre publié et de sa lecture, sans prendre en considération l’écriture dans son développement temporel ? Certains phénomènes exogénétiques, repérables au cours de la genèse, peuvent n’avoir laissé aucune trace visible dans l’œuvre définitive, tout en ayant contribué de manière cruciale à sa conception, à ses transformations et à sa réalisation. Prise au piège de sa clôture sur le texte définitif, l’approche intertextuelle se condamne à ne pas pouvoir identifier ni comprendre la véritable étendue et la complexité des opérations intertextuelles dont les brouillons et les manuscrits de travail sont eux-mêmes le théâtre, dès le début de la genèse et  à chacune de ses étapes. C’est pour répondre à cette nécessité critique que la génétique a développé le concept d’exogenèse et son partenaire dialectique, l’endogenèse.

En s’ouvrant à des domaines non spécifiquement textuels (peinture, sculpture, architecture, musique, histoire des sciences, etc.) l’approche génétique a étendu et spécifié le concept d’exogenèse pour l’adapter à l’analyse de nouveaux types d’archives. C’est donc aussi bien dans son impact sur l’étude des littératures (françaises, francophones et étrangères) que pour l’étude des productions artistiques et scientifiques que ce numéro spécial de Genesis cherchera à penser l’exogenèse – et ses rapports à l’intertextualité – à travers des articles de théorie et des analyses de corpus. Il s’agira, dans ce cadre, de proposer des études de cas particulièrement représentatifs du processus exogénétique, de s’interroger sur les différentes formes qu’il peut prendre au cours de la genèse, de faire le bilan des acquis méthodologiques, sans s’interdire de formuler de nouvelles hypothèses sur son statut et son rôle dans l’interprétation de l’avant-texte. — Pierre-Marc de Biasi, Céline Gahungu

 

Bibliographie indicative

• Adam Jean-Michel, Souvent textes varient : génétique, intertextualité, édition et traduction, Paris, Classiques Garnier, coll. « Investigations stylistiques », 2018.

• Anokhina Olga, « De l’avant-texte à la scène : le Molière de Boulgakov. Réflexion sur l’exogenèse », in Grésillon Almuth, Mervant-Roux Marie-Madeleine, Budor Dominique (dir.), Genèses théâtrales, Paris, CNRS Éditions, coll. « Textes et manuscrits », 2010.

• Aragon Louis, Les Collages, Paris, Hermann, coll. « Miroirs de l’art », 1965.

• Bakhtine Mikhaïl, La Poétique de Dostoïevski, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Pierres vives », 1970.

• Biasi Pierre-Marc de, « Théorie de l'intertextualité », in Dictionnaire des genres et notions littéraires, Encyclopædia Universalis, Paris, Albin Michel, p. 371-378. (Réédition du texte publié in Encyclopædia Universalis, volume Corpus, Paris, 1989, p. 514-516.)

— « Théorie du texte : l’écriture et ses sources. Endogenèse et Exogenèse », in Kazuhiro Matsuzawa (dir.), Le Texte et ses genèses, Actes du troisième colloque SITES-Studies for the Integrated Text Science,  Nagoya, Graduate School of Letters Nagoya University, 2004, p. 5-16.

— « Génétique, intertextualité et histoire littéraire. Entretien avec A. Compagnon », Propos recueillis par Pierre-Marc de Biasi et Anne Herschberg Pierrot », Genesis, n°30, « Théorie : état des lieux », 2010, p. 55-57.

— « Le Manuscrit cannibale. Biographie, intertexualité, genèse », in Daniel Delas (dir.), La Question de l'intime. Génétique et biographie, Limoges, PULIM, coll. « L’un et l’autre en français », 2018, p. 17-37.

• Bouillaguet Annick, Marcel Proust, le jeu intertextuel, Paris, Éditions du Titre, 1990.

L’Écriture imitative : pastiche, parodie, collage, Paris, Nathan, coll. « Fac. Série littérature », 1996.

Proust lecteur de Balzac et de Flaubert : l’imitation cryptée, Paris, Champion, coll. « Littérature de notre siècle », 2000.

• Cavaillès Nicolas, « Génétique et dialogisme », Genesis, n°30, « Théorie : état des lieux », 2010, p. 191-195.

• Compagnon Antoine, La Seconde main ou le travail de la citation, Paris, Éditions du Seuil, 1979. 

Le Démon de la théorie : littérature et sens commun, Paris, Éditions du Seuil, coll. « La couleur des idées », 1998.

• Corinus Véronique, Gauvin Lise, Selao Ching, Van Den Avenne Cécile (dir.), Littératures francophones : parodies, pastiches, réécritures, Lyon, ENS Éditions, coll. « Signes », 2013. 

• Debray-Genette Raymonde, Métamorphoses du récit : autour de Flaubert, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1988.

• Escola Marc, Rabau Sophie, Littérature seconde ou La Bibliothèque de Circé, Paris, Éditions Kimé, coll. « Détours littéraires », 2015.

• Ferrer Daniel, « Un imperceptible trait de gomme de tragacanthe… », in D’Iorio Paolo, Ferrer Daniel (dir.), Bibliothèques d’écrivains, Paris, CNRS Éditions, coll. « Textes et Manuscrits », 2001, p. 7-27.

— « Quelques remarques sur le couple intertextualité-genèse », in Gifford Paul, Schmid Marion (éd.), La Création en acte : devenir de la critique génétique, Amsterdam ; New York, Rodopi, 2007, p. 205-216.

• Genette Gérard, Introduction à l’architexte, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1979.

— Palimpsestes : la littérature au second degré, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1982.

— Seuils, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1987.

• Kristeva Julia, « Le mot, le dialogue, et le roman », Critique, n°239, avril 1967, p. 438-465.

Sèméiotikè : recherches pour une sémanalyse, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Tel quel », 1969.

• Le Calvez Éric, « La charogne de Bouvard et Pécuchet. Génétique du paragramme », in Le Calvez Éric, Canova-Green Marie-Claude, Textes et intertextes, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, coll. « Faux titre », 1997, p. 233-261.

— La Production du descriptif : exogenèse et endogenèse de L’Éducation sentimentale, Amsterdam ; New-York, Rodopi, coll. « Faux titre », 2002.

• Mangeon Anthony, Crimes d’auteur : de l’influence, du plagiat et de l’assassinat en littérature, Paris, Hermann, coll. « Fictions pensantes », 2015.

• Maurel-Indart Hélène, Du plagiat, Paris, Gallimard, coll.  « Folio Essais », 2011.

• Milesi Laurent, « Inter-textualités : enjeux et perspectives (en guise d’avant-propos), in Le Calvez Éric, Canova-Green Marie-Claude, Textes et intertextes, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, coll. « Faux titre », 1997, p. 7-34.

• Mitterand Henri, Le Roman à l’œuvre : genèse et valeurs, Paris, PUF, coll. « Écriture », 1998.

« Intertexte et avant-texte : la bibliothèque génétique des Rougon-Macquart », Genesis, n°13, 1999, p. 89-98.

• Pickering Robert, « Écriture et intertexte chez Valéry : portée et limites génétiques », in Le Calvez Éric, Canova-Green Marie-Claude, Textes et intertextes, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, coll. « Faux titre », 1997, p. 219-232.

• Piégay-Gros Nathalie, Introduction à l'intertextualité, Paris, Dunod, coll. « Lettres supérieures », 1996.

Poétique, n°27, « Intertextualités », septembre 1976.

n°29, « Recherches », décembre 1979.

• Rabau Sophie (dir.), L'Intertextualité, Paris, Flammarion, coll. « Corpus », 2002.

• Rastier François, « Parcours génétique et appropriation des sources. Exemple d’Hérodias », in Le Calvez Éric, Canova-Green Marie-Claude, Textes et intertextes, Amsterdam ; Atlanta, Rodopi, coll. « Faux titre », 1997, p. 193-218.

• Rastier François, Pincemin Bénédicte, « Des genres à l’intertexte », Cahiers de praxématique, n°33, 1999, p. 83-111.

• Riffaterre Michaël, La Production du texte, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1979.

— « L’intertexte inconnu », Littérature, n°41, 1981, p. 4-7.

— Sémiotique de la poésie, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1982.

• Samoyault Tiphaine, L’Intertextualité : mémoire de la littérature, Paris, Armand Colin, coll. « 128 : Littérature », 2001.

• Schlanger Judith, La Mémoire des œuvres, Paris, Nathan, coll. « Le texte à l’œuvre », 1992.

• Sollers Philippe (dir.), Théorie d’ensemble, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Tel Quel », 1968.

• Todorov Tzvetan, Mikhaïl Bakhtine, le principe dialogique, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Poétique », 1981.

• Van Hulle Dirk, « Claus et la narratologie exogénétique. La cognition externe (extended mind) et les notes de lecture autour du Chagrin des Belges », Études Germaniques, 2013/1, n° 269, p. 93-109.

Modalités de soumission

• Envoi des propositions d’article : au plus tard le 15 février 2019.

• Les propositions (titre et résumé : 500 mots) et une brève présentation de l’auteur (nom, prénom, courriel, affiliation(s), recherches) doivent être envoyées aux adresses suivantes : 

Pierre-Marc de Biasi : pm.debiasi@wanadoo.fr ;

Céline Gahungu : cgahungu@hotmail.fr

• Réponse du comité : 15 mars 2019. 

• Date limite d’envoi des articles retenus : 15 octobre 2019. 

• Date de parution du numéro : novembre 2020.