Essai
Nouvelle parution
J. Roubaud, Peut-être ou La Nuit de dimanche (Brouillon de prose)

J. Roubaud, Peut-être ou La Nuit de dimanche (Brouillon de prose)

Publié le par Université de Lausanne

Référence bibliographique : J. Roubaud, Peut-être ou La Nuit de dimanche (Brouillon de prose), , 2018.

 

Peut-être ou La Nuit de dimanche
(Brouillon de prose)

 

Jacques Roubaud

Seuil, coll. La Librairie du XXIe siècle
Date de parution 18/01/2018
20.00 € TTC
192 pages
EAN 9782021388237

 

Quand ma sœur est née, j’avais un peu moins de quatre ans. On me demanda si j’étais content. Je répondis (ai-je appris) que je m’étais déclaré content « d’avoir une tortue et une petite sœur ». Rien que d’assez banal.
Quand mon plus jeune frère est né, le benjamin de notre famille, j’en fus, je m’en souviens, très heureux. C’était la nuit de la Saint-Jean de 1939. Il s’est suicidé en 1961. Il était le préféré, je pense, je pense avoir toujours pensé, de ma mère. Peut-être des autres membres de notre famille. Je ne sais pas.
Comment faire ? Une solution, une seule : être un benjamin.

Autobiographique est ce roman, ce brouillon de roman, donc, comme je viens de le décider ; de même tout roman est autobiographie de celui qui lui donne son nom.

Écrire et publier son autobiographie n’a guère de sens. Pourquoi n’y en aurait-il qu’une ? Si on en composait une tous les dix ans, par exemple, ce serait déjà moins une prétention ridicule à transmettre au monde LA vérité sur soi-même. Toutes les autobiographies que je connais prétendent cela.

Je n’ai pas le temps, je n’aurai pas le temps de tendre à l’excellence dans la composition de mon roman. Je sais qu’il faut, qu’il faudrait que les chapitres se suivent et ne se ressemblent pas, tout en étant confinés dans des dimensions raisonnables, peut-être préétablies par l’Auteur, qui cependant ne peut être ni Diderot, ni Stendhal, qui ne doit pas s’efforcer à jouer Monsieur de Chateaubriand ou Christine Angot, bien que parlant, comme eux, de moi et encore de moi.

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On peut lire sur en-attendant-nadeau.fr un article sur cet ouvrage :

"Brouillons de soi", par Jeanne Bacharach

"Dans Peut-être ou la nuit de dimanche, Jacques Roubaud, poète de l’Oulipo, s’essaie aux genres de l’autobiographie et du roman. Pressé par le temps qui passe et les opérations chirurgicales qui se succèdent, l’écriture du moi, ou, plus exactement, des moi, s’impose. S’il affirme : « Écrire et publier son autobiographie n’a guère de sens », Jacques Roubaud compose et décompose un roman du moi mouvant et hésitant, à travers quatre fils d’Ariane, ou « modes biographiques », auxquels correspondent une police particulière et une couleur. Roman expérimental ou exercice de soi, Peut-être ou la nuit de dimanche apparaît comme un texte mouvant dans son inachèvement, vivant jusque dans ses inquiétudes et ses imperfections."