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"L’impasse" dans les créations artistiques et scientifiques (Libreville, Gabon)

Publié le par Marc Escola (Source : DIANDUÉ Bi Kacou Parfait)

« L’impasse » dans les créations artistiques et scientifiques

 Colloque international, Libreville UOB : 23 et 24 mai 2019

Le monde est une grosse nasse qui prend au piège de la vie les humains et leur volonté de liberté. Prendre conscience de cet état de fait, c’est intégrer que l’existence humaine est un champ de mines où poser chaque pas relève de la prouesse de l’équilibriste. Immobilisée face au feu tricolore qui rythme la cadence de nos volontés, de nos désirs et de nos ambitions, l’hésitation est maîtresse de nos actes. Passer au vert, stationner au rouge, dégager rapidement à l’orange ou ralentir pour s’arrêter ? Cette sémiotique du visible clignotant s’agace de ceux qui ignorent les codes et mettent en panne l’harmonie de la circulation sur les voies des espérances humaines. Le voyage de nos libertés mène aux horizons quadrillés par les barreaux sécants de la nasse existentielle. Comme l’affirme Karl Popper « toute vie est résolution de problème » (1999). Transposé dans la territorialité du texte littéraire et dans la création artistique, la métaphore de la nasse et du piège géant interpelle sur le sens de la fiction dans l’apocalypse du monde. Que peut l’art face aux injustices du monde ? Que peut la littérature face à l’empire de la destruction ? Le sens pratique de l’action résiste-t-il à la simple tentation de la conscience des choses ?

S’ouvre, ici, le questionnement sur la poétique de l’impasse. La rhétorique de la création littéraire et artistique, qui met en fiction la philosophie de l’impasse, décline les formes, les stratégies, les scénarios et la sémantique du piège dans l’esthétique fictionnelle. La littérature, lieu de toutes les tensions, à la fois comme possibles attendus et inattendus et comme crise, est l’espace de construction de l’imaginaire d’une impasse tentaculaire. Elle génère également, dans un mouvement corrélé de la réception, le sens de l’impasse englobante quand la critique la déconstruit.

L’Impasse (Cartlito’s way), film américain réalisé par Brian De Palma (1993), avec Al Pacino dans le premier rôle, met en œuvre la mécanique de l’engrenage menant les personnages vers des voies sans issues : changer de vie, se défaire du passé, envisager l’avenir dessinent les contours d’une impossibilité de faire autrement pour le délinquant en passe de reconversion. Elle tient moins dans les ressorts de l’infortune personnelle que dans la tragédie de l’existence criminelle qui enserre l’homme, même à son corps défendant, dans les mailles d’un filet dont il ne peut se dégager : plus il s’en débat et plus il en est prisonnier. Cette circontance délictueuse est autant une lecture pessimiste du monde qu’une perspective cynique de la vie et des choses. C’est celle qui fait dire d’ailleurs à Bernard Dugué (2017) que « la science moderne est dans l’impasse ! Ce verdict n’annonce pas la fin des activités scientifiques dont l’avancée dans l’impasse ne prendra jamais fin. Il ne fait que traduire l’absence de progression dans la connaissance des choses que sont la matière, le cosmos, la vie et l’homme ».

À l’impossibilité de connaître intimement les corps constituants de l’univers humain, se corrèle le conflit des interprétations dans la perspective non seulement d’une clarification des enjeux scientifiques, mais aussi d’une clarté des objets qui en relèvent. Si pour Françoise Parot, suivant le titre de son ouvrage, « La psychologie française [est] dans l’impasse », c’est en raison autant des débuts de son magister universitaire, que des oppositions entre psychologie scientifique, psychologie philosophique et psychanalyse. Dans cette double option, « l’impasse concerne l’existence même de la psychologie scientifique, discipline qualifiée d’incapable de ‘tenir compte de la part des valeurs et des choix subjectifs, qui sont singuliers et infiniment variables et labiles’».

Qu’il s’agisse des sciences de l’homme et de la société ou des sciences expérimentales, l’épreuve du cul-de-sac semble, dans cette logique, redoutée en ces domaines où s’élaborent les savoirs de demain, s’évaluent ceux d’hier et s’expérimentent ceux d’aujourd’hui. En attirant l’attention sur les lignes de fuite et les zones grises où s’imaginent et se dessinent les pertes et les points de recul, les mythes des abysses font craindre le pire en même temps qu’ils rappellent l’humaine condition d’une impuissance ou d’une inaptitude de l’être humain à rivaliser malgré tout avec l’absolu du savoir et de la technique.

Quelques axes nourriront la réflexion.

1. Les métaphores de l’impasse, de l’écriture du piège ou de la conception de l’espace

La littérature est un haut lieu de figuration allégorique et symbolique des mondes et des possibles. On peut dès lors se demander comment l’idée de l’impossibilité urbanistique de l’impasse est représentée par les écrivains ou même comment les arts et les sciences de l’homme et de la société montrent la rupture cinétique du « cul-de-sac » dans l’organisation de la voierie. C’est surtout l’idée de la gêne et du « tourner sur soi », l’expression de la ritournelle de l’hésitation qui est à rechercher dans les écritures artistiques (littérature, cinéma, sculpture, peinture…) et dans les approches sociolinguistiques, sociologiques, topographiques, de l’espace urbain.

2. Les territoires de l’impasse dans la création artistique et les expériences scientifiques

L’impasse paraît à sa déclinaison figurale une donnée polymorphe. Elle est tout autant poly-situationnelle. Les mots pour la dire, les images pour l’exprimer, les métaphores pour la générer sont tous des territoires d’expression de l’impasse. Les reculs, les replis ou les revers des scientifiques sont autant des voies de recherche pour penser une incapacité ou encore pour concevoir une alternative à la science. Qu’en est-il dans votre domaine ou dans votre discipline ?

3. La société dans l’impasse : crises et résolutions de conflits

L’évidente leçon de vie est que l’histoire des hommes et des sociétés est faite de crises. En l’occurrence, les rencontres, la gestion des relations entre les hommes ou entre les sociétés, l’organisation de ces sociétés humaines créent des espaces d’échange de valeurs culturelles et économiques qui ostensiblement établissent des hiérarchies entre les cités. La hiérarchisation des intrants culturels et économiques, la volonté de prédation et de domination font gripper la fluidité synaptique des rencontres entre les différentes cultures humaines. Il en résulte que dans l’arène de la vie et de la brousse de l’existence, la dialectique cynégétique qui oppose la proie au chasseur est le reflet de la lame du bourreau sur la gorge de sa victime. L’impossible dialogue constaté entre les civilisations plonge ainsi l’humanité dans une impasse permanente.

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Vous adresserez votre résumé de 250 mots au plus tard le 30 septembre 2018 aux contacts suivants : diandueb@yahoo.fr; martine.renouprez@uca.es; pierremongui2000@yahoo.fr

Vous y indiquerez le titre et les mots clés de votre communication, votre affiliation institutionnelle, vos grade et/ou qualité.

Porteurs du projet

DIANDUÉ Bi Kacou Parfait U. Félix Houphouët-Boigny

MONGUI Pierre Claver U. Omar Bongo

RENOUPREZ Martine U. Cadix