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Le Pardaillan n°7 : Go West !

Le Pardaillan n°7 : Go West !

Publié le par Romain Bionda (Source : Luce Roudier)

Appel à propositions d’articles, pour le 15 février 2019

Pour la première fois, le dossier du septième numéro du Pardaillan s’intéressera à un genre particulier, le western. Il ne s’agira pas tant d’explorer les limites de ce genre, ni de dresser l’inventaire de ses caractéristiques propres, mais plutôt d’interroger la façon dont le genre a colonisé des médias successifs et s’est inscrit dans les imaginaires collectifs en s’appropriant les modes de fonctionnements des cultures médiatiques. Le western est souvent présenté (à l’instar du cape et d’épée avec lequel il présente nombre de ressemblances) comme un genre dont le déclin est achevé, et qui échoue à séduire le public du XXIe siècle ; mais il n’est que de constater l’engouement suscité par la sortie récente de Red Dead Redemption 2 pour s’assurer que le genre est particulièrement vivace hors de ses médias d’origine.

Car si ce genre narratif singulier est habituellement circonscrit au cinéma, il s’en affranchit aisément aujourd’hui, et trouve ses origines dans la littérature. A la Belle Epoque, il représente une portion non négligeable de la production romanesque de littérature populaire, faisant notamment la renommée des fascicules Eichler avec des séries comme Buffalo Bill.Ces romans sont accompagnés par une iconographie foisonnante et débridée, qui prépare le terrain aux arts visuels : dès ses origines littéraires, le western a un rapport privilégié à l’image, ce qui explique qu’il trouve une telle implantation au cinéma, mais aussi en bande-dessinée – il suffit d’imaginer la mèche et le mégot de Lucky Luke, nonchalamment monté sur Jolly Jumper, pour se trouver transporté dans les plaines de l’Ouest. Mais le western n’est pas que visuel : il est également unifié comme un tout cohérent par sa musique, qu’il s’agisse de la partition originale de films (la mythique musique de Prisonnière du désert) ou de chansons emblématiques (My darling Clementine, sans laquelle l’approche de Henry Fonda sur son cheval n’aurait pas la même saveur). Au même titre que certains éléments visuels indétrônables, la musique caractérise le western sans doute possible.

Le western a également un rapport complexe à son fonds historique, bien résumé par la réplique finale de L’homme qui tua Liberty Valance : « Quand la légende devient réalité, imprimez la légende ». Le western mythifie, aussi bien les hors-la-loi et les bandits que les porteurs d’étoiles de shériff, aussi bien les personnages historiques que les personnages fictifs. Au cinéma, il mythifie également ses acteurs : il est difficile de séparer John Wayne de son large chapeau de cow-boy, même lorsqu’il joue un tout autre rôle. Derrière ses personnages mythiques, le western s’associe tout un cortège de figures emblématiques : le cow-boy, le shériff, le héros solitaire, l’éclaireur, le pionnier, la femme fatale, le joueur professionnel… Ces personnages évoluent eux-mêmes dans un ensemble de topoi : la grande prairie, le désert, le saloon, le ranch. Ces lieux communs ancrés dans l’imaginaire collectif ouvrent la porte à une infinité de discours possibles, critiques, polémiques, politiques, féministes… Au-delà de son aspect parfois manichéen (le shériff contre le hors-la-loi, les visages pâles contre les Indiens), le western pose de véritables questions politiques et éthiques, sur le nécessaire dévoilement de la vérité (L’homme qui tua Liberty Valance), sur les différentes versions possibles de l’histoire de la conquête du territoire américain (La conquête de l’Ouest versus Les Cheyennes, d’ailleurs tous deux (co-)réalisés par John Ford), etc.

Aujourd’hui, malgré quelques résurgences au cinéma (souvent sur le mode du remake, comme Les Sept mercenaires de 2016), le western semble particulièrement prolifique dans le cadre de son expansion aux médias ludiques : jeux de société, jeux de rôles et jeux vidéo s’en approprient les caractéristiques, les passant au filtre des mécanismes ludiques qui leur sont nécessaires. Ainsi le jeu de cartes Bang ! revisite les fameux échanges de coups de colt par le biais de cartes d’action « Bang », permettant de tirer, et par la distance qui sépare les joueurs (pour tirer sur un joueur éloigné, il faut une carte « Carabine »). On ajoutera pour finir que le western, avec toute la rigidité apparente de ses caractéristiques génériques, a pu donner lieu à deux formes de réappropriation et d’hybridation : la parodie et le mélange des genres. On trouve en effet de nombreux westerns mêlant, par exemple, les composantes d’un western traditionnel avec une intrigue fantastique, et nombreux sont les westerns qui présentent également tous les traits d’un film policier. La parodie, de son côté, n’a pas attendu bien longtemps pour s’emparer du monde codifié du western : dès 1925 le film de Buster Keaton, Go West, met en scène un jeune vagabond qui se prend d’affection pour une vache, après avoir suivi l’injonction de la statue d’Horace Greeley : « Go west, young man, go west… ».

Toutes ces pistes pourront être explorées lors de ce numéro, en portant une attention particulière à la façon dont le genre s’adapte aux différents médias qu’il utilise. Les contributions pourront porter sur l’ensemble du champ médiatique (littérature, BD, jeu vidéo, spectacle vivant, cinéma, musique et chanson, internet, etc), et seront particulièrement bienvenues les propositions transversales visant à explorer plusieurs champs médiatiques.

Les propositions de contribution, d’une longueur de 500 à 1000 mots environ, sont à adresser à luce.roudier [@] gmail.com pour le 15 février 2019 au plus tard. Si la proposition est retenue, l’auteur sera informé avant fin février, et l’article sera demandé pour le 15 août 2019. La parution est prévue pour septembre 2019.