Actualité
Appels à contributions
Walter Benjamin et le XIXe siècle aujourd’hui (Londres)

Walter Benjamin et le XIXe siècle aujourd’hui (Londres)

Publié le par Université de Lausanne (Source : Jean-Michel Gouvard)

[English version below]

 

Walter Benjamin et le XIXe siècle aujourd’hui

Colloque international organisé par

l'Institute of Modern Languages Research (School of Advanced Study, University of London),

en collaboration avec Textes / Littératures: Ecritures et Modèles (EA 4195, Université de Bordeaux Montaigne)

Date: 12 et 13 Décembre 2019

Lieu: Institute of Modern Languages Research, Senate House

Conférenciers invités :

Pr Michael W. Jennings (Princeton University) ;

Pr Marc Berdet (University of Brasilia - à confirmer) 

 

Walter Benjamin est l’un des plus importants philosophes, critiques et écrivains européens de l’entre-deux guerres. En ce début de XXIe siècle, son œuvre est plus influente que jamais et elle est désormais disponible en traductions dans de nombreuses langues – non seulement ses essais et articles, mais aussi ses textes littéraires, sa correspondance, et d’innombrables notes et brouillons. Parmi les nombreux domaines qu’il a investis, sa compréhension du XIXe siècle et l’analyse de la modernité qui en est son corollaire sont sans aucun doute parmi ses plus significatives contributions, même s’il n’a pas eu le temps d’achever son Grand Œuvre, Le Livre des Passages. Assumant avec Benjamin (et Michelet) que « chaque époque rêve de la suivante », le temps est venu, près de quatre-vingt ans après sa mort, d’examiner la manière dont les universitaires, dans diverses disciplines, pensent aujourd’hui le XIXe siècle à la lumière de son œuvre – et ce, en s’intéressant également aux approches qui, tout en s’y référant, critiquent ses propositions. L’objectif principal de ce colloque, reformulé en termes plus benjaminiens, vise ainsi à étudier les échos qui nous parviennent aujourd’hui de la manière dont le XIXe siècle a rêvé son propre futur – à travers l’œuvre du philosophe.

Partant de l’idée que tout discours critique est une forme d’historicisation, nous souhaitons accueillir des études comparées des représentations du XIXe siècle qui mettront en parallèle celles dégagées, ou parfois seulement suggérées, par Benjamin dans l’entre-deux guerres, et celles que proposent aujourd’hui les chercheurs qui prolongent ses travaux. Ce questionnement se focalisera sur les concepts comme sur les thèmes chers à Benjamin, et si nécessaire sur la manière dont ils sont corrélés les uns aux autres. On s’interrogera plus précisément sur la pertinence actuelle de notions telles que le kitsch, la flânerie ou l’ennui. Et on se demandera dans quelle mesure des objets comme les passages et les galeries commerciales, les expositions, les éclairages urbains, l’architecture du verre, l’Art nouveau, les publicités ou les barricades conduisent à repenser la modernité et le modernisme. On cherchera aussi à déterminer quels thèmes et quels phénomènes pourraient être les équivalents contemporains de ces éléments typiquement associés au XIXe siècle (par ex. : changement climatique et apocalypse, intimité et vie privée, réseaux sociaux et exhibitionnisme, végétarisme et alimentation bio, zombies, représentations des corps vivants/morts, corps jeune et sain, tatouages, etc.), et dans quelle mesure l’approche proposée par Benjamin pour analyser les représentations culturelles dans l’histoire nous aide aujourd’hui à mieux comprendre la période post-moderne.

Pour penser le XIXe siècle, Benjamin s’est intéressé à des figures telles que Baudelaire, Daumier, Haussmann. Mais si nous continuons en partie de lire Baudelaire à la lumière du philosophe allemand, le regard que nous portons sur le poète n’est plus celui des années 1930. On cherchera donc à déterminer quelle réception nous avons aujourd’hui des représentations du XIXe siècle qui transparaissent à travers la vision benjaminienne d’un Baudelaire « à l’apogée du capitalisme » – et on pourra se poser la même question entre autres pour Daumier ou Blanqui. Par ailleurs, dans quelle mesure pourrait-on appliquer une approche « benjaminienne » à des écrivains français tels que Flaubert ou Zola, que le philosophe avait lu mais qu’il n’a jamais analysés en profondeur, bien que leur œuvre ait une forte dimension sociale et politique ? Enfin, on se demandera quels écrivains, caricaturistes, architectes ou activistes politiques pourraient être les équivalents de la constellation Baudelaire/Daumier/Haussmann/Blanqui dans d’autres pays, à commencer par le Royaume-Uni.

La célèbre formule « Paris, capitale du XIXe siècle » reflète une conception holistique du XIXe siècle – et ce présupposé est latent dans les écrits de Benjamin. Mais la dissémination de sa pensée à travers l’Europe met en cause ce postulat, et on se examinera donc s’il n’existe pas « des » XIXemes siècles plutôt qu’un seul. Des contributions pourraient explorer cette piste en identifiant des spécificités nationales (par ex. l’anglophilie en France, l’influence des colonies sur la consommation au Royaume-Uni, l’érotisme à Vienne au tournant des deux siècles, le Kulturkampf en Prusse, etc.), ou en étudiant des représentations culturelles et économiques que Benjamin a délaissées, telles que les pratiques médicales (par ex. la description clinique en psychiatrie), l’essor de la spéculation boursière, le théâtre de boulevard et les variétés, la peinture figurative, l’esthétique populaire romantique, etc. Une mise au point sur ce que l’on peut appeler « l’arrière-garde » de la modernité pourrait également être fructueuse.

Pour compléter le point précédent, et vu que le colloque se tiendra à Londres, il serait souhaitable de se focaliser entre autres sur l’époque victorienne et les représentations du XIXe siècle qui lui sont liées. Une approche comparative entre le XIXe siècle français tel que Benjamin l’a envisagé – ou tel que nous le comprenons aujourd’hui en s’appropriant ses outils – et l’ère victorienne permettrait aussi une meilleure compréhension de la période, et de sa pertinence pour analyser la nôtre.

Enfin, Walter Benjamin n’est pas le seul penseur associé à l’Ecole de Francfort dont l’héritage nourrit la recherche contemporaine, et de nombreux universitaires travaillent sur le XIXe siècle et le concept de modernité en combinant les propositions de Benjamin avec celles, entre autres, d’Ernst Bloch, de Siegfried Kracauer ou de Theodor W. Adorno, si bien que l’on pourra aussi examiner comment leurs points de vue, qui sont loin d’être toujours convergents, conduisent à une compréhension renouvelée du XIXe siècle et des concepts qui lui sont liés.

Les thèmes possibles, sans que cela soit restrictif, sont les suivants :

  • Le XIXe siècle de Walter Benjamin aujourd’hui : concepts et thèmes
  • Repenser la modernité et le modernisme à la lumière de Benjamin
  • « Un » ou « des » XIXemes siècles ? / Paris et les autres capitales européennes
  • La pensée de Benjamin et l’époque victorienne
  • Par-delà Baudelaire/Daumier/Haussmann/Blanqui : les figures « benjaminiennes » dans les sociétés de traditions non-francophones
  • Héritage du kitsch : Arts graphiques, bandes-dessinées, pop music, esthétique gore, etc.
  • Passages, galeries, expositions, musées
  • Intimité et vie privée, réseaux sociaux et exhibitionnisme
  • Benjamin et le post-modernisme
  • La pensée de Benjamin et les représentations de l’apocalypse aujourd’hui
  • Benjamin et l’héritage de l’Ecole de Francfort

Les propositions de contributions collectives et de tables rondes sont les bienvenues.

Les propositions de communication, comportant un résumé (300 mots) avec un titre pour une contribution de 20 minutes et une brève biographie (100 mots), doivent être envoyées avant le 25 avril 2019 à l’adresse mail suivante : 

Jean-Michel.Gouvard@u-bordeaux-montaigne.fr

La langue du colloque est l’anglais.

Organisateur: Pr Jean-Michel Gouvard, TELEM, Université de Bordeaux Montaigne (France).

*          *          *

[English version]

Walter Benjamin & the Nineteenth Century Today

International conference organized by the Institute of Modern Languages Research (School of Advanced Study, University of London), in collaboration with Textes / Littératures: Ecritures et Modèles (EA 4195, Université de Bordeaux Montaigne)

Dates: 12 & 13 December 2019

Venue: Institute of Modern Languages Research, Senate House

Keynote speakers: Prof Michael W. Jennings (Princeton University), Prof Marc Berdet (University of Brasilia - tbc)

 

Walter Benjamin is one of the most prominent European philosophers, writers and commentators of the interwar period. Today, in the early 21st century, his work is more influential than ever and available in translation across a wide range of languages – not only his essays and articles, but also his literary texts, his correspondence, and countless notes and drafts. Among the numerous fields he investigated, his understanding of the 19th century and his conceptualization of the closely related concept of modernity are undoubtedly among his most significant achievements, although he never completed his Magnum Opus, The Arcades Project. Assuming with him and Michelet that “every epoch dreams the one to follow”, the time has come, nearly eighty years after his death, to review the way scholars think about the 19th century today in light of his work – and this includes critical approaches that takes issue with his ideas. The conference theme can thus be formulated in a more Benjaminian way: its “subject matter” will be to study the echoes today of how the 19th century dreamt its own future.

Considering that criticism is always a kind of historicization, the conference invites papers on comparative studies of representations of the 19th century, both, those suggested by Benjamin during the 1920s and 1930s and those of today suggested by researchers drawing on his work. This questioning will focus on concepts as well as on topics, and if required on how both are related. More precisely, how are notions such as kitsch, strolling or spleen relevant today? How might their concrete manifestations in forms such as arcades, exhibitions, illuminations, glass architecture, Jugenstil, advertising and barricades, enable us to rethink modernity and modernism? What topics and phenomena could be the equivalent of these categories in the 21st century: climate change & apocalypse, intimacy & privacy, social networks & exhibitionism, vegetarianism, organic foods, zombies, corpses & bodies, healthy bodies, tattoos, and so on. And how might Benjamin’s approach to analyzing cultural representations in history, and the heuristics it implies, be useful in conceptualizing post-modernism?

Thinking about the 19th century, Benjamin focused on French figures like Baudelaire, Daumier, Haussmann. But even if we do read Baudelaire through Benjamin, we will not be reading the poet in the same way that Benjamin read him in the 1930s. What are current perceptions of Benjamin's studies of Baudelaire and the nineteenth century? And we could ask the same question for Daumier or Blanqui, among others. Also, how might a Benjaminian perspective be applied to major French writers like Flaubert or Zola, who Benjamin read but did not really discuss, despite their being deeply involved in the social and political fabric of the 19th century? Finally, which writers, caricaturists, architects or political activists might be the counterparts of Baudelaire/Daumier/Haussmann/Blanqui in non-French traditions, beginning with the U.K.?

The famous formula “Paris, Capital of the 19th century” implies that the 19th century, in Europe at least, is a single whole – and this idea is latent in Benjamin’s writings. But the dissemination of his thought beyond Europe questions such an idea, and we have to wonder if there are not several 19th centuries instead of a single one. Papers might explore this idea either by identifying national specificities (e.g. French Anglophilia, colonial influence over consumerism in the U.K., eroticism in Vienna at the turn of the century, and so on), or in a same country, by exploring economic and cultural representations Benjamin did not address, such as medical practices (e.g. psychiatric care), increase in government bonds and stock speculation, boulevard theatre and variety shows, figurative painting, survival of pop romantic aesthetics, and so on. A focus on what we might call the rearguard of modernity might be particularly fruitful.

To extend the previous idea, and because the conference will take place in London, papers might consider Victorian London, and representations of the 19th century it embodies. A comparative approach between the French 19th century as Benjamin understood it – or as we understand it today by appropriating his tools and concepts – and the Victorian period should enable us to get a better grasp of the period, and of its relevance for the present day.

Furthermore, Walter Benjamin is not the only thinker related to the Frankfurt School whose legacy enriches current research, and many scholars are working on the 19th century and the concept of modernity by combining Benjamin’s proposals with, among others, Ernst Bloch’s, Siegfried Kracauer’s or Theodor W. Adorno’s insights. How might their respective, and not always converging, views lead to a new – if not better – understanding of the 19th century and related concepts?

            Possible topics for papers include, but are not restricted to:

  • Benjamin’s 19th century today: concepts and topics
  • Rethinking modernity and modernism in light of Benjamin
  • 19th century versus 19th centuries / Paris versus other European capitals
  • Benjamin’s thought & the Victorian era
  • Benjamin’s counterparts (Baudelaire/Daumier/Haussmann/Blanqui) in non-French traditions
  • Kitsch legacies: Graphic arts, Comics, Pop music…
  • Arcades, exhibitions, museums
  • Intimacy & privacy, social networks & exhibitionism
  • Benjamin and Post-modernism
  • Benjamin’s thought and apocalypse today
  • Benjamin and the legacy of the Frankfurt School

We welcome joint proposals for two-speaker papers; panel or round table proposals are also welcome.

Send abstracts (300 words) with title for 20 min papers and short bio (100 words) to Jean-Michel.Gouvard@u-bordeaux-montaigne.fr by April 25th, 2019.

Organiser: Prof Jean-Michel Gouvard, TELEM, Université de Bordeaux Montaigne (France).