Colloque 2024
Du 15 au 19 juin 2024 Université McGill Montréal, Québec, Canada
Appel à propositions de communications
Violence et renfermement féminin sous l’Ancien Régime
Responsables d’atelier :
Samantha Carron, UBC-Okanagan Campus Marianne Legault, UBC- Okanagan Campus
Période de l’histoire de France reconnue pour son « grand renfermement » des femmes (Regina), le dix-septième siècle de Louis XIV marque l’exclusion de ce qui est à l’époque interprété comme marginal. Sous le Roi soleil, le renfermement est rapidement devenu un ensemble de limites imposées aux femmes. Nées « du sexe faible » dans une société patriarcale où l’assujettissement reste la norme, les femmes sont souvent perçues comme étant à défaut et par conséquent elles nécessitent la surveillance et, au besoin, la punition; car il s’agit d’une société qui cherche à cloîtrer et à confiner une féminité « perturbante » afin d’éloigner du collectif celles qui s’écartent de la norme sociale et des principes imposées par l’ordre public (ibid.).
Au Grand Siècle, les femmes sont ainsi renfermées dans un système patriarcal qui les rend de plus en plus confinées, souvent invisibles et qui leur fait violence. D’ailleurs, dans cette société où « les riches se distinguent des pauvres, les savants des ignorants, [et] les hommes des femmes », les normes genrées réduisent ces dernières à une identité sociale « autre », par rapport à celle des hommes (Merlin-Kajman, 298). Les registres paroissiaux français de l’Ancien Régime le démontrent bien ; les femmes étaient à l’époque « des femmes de, veuves de, filles de » (Godineau, 53). Toutefois, il n’est pas rare que certaines femmes se soient créé des espaces identitaires « autrement autres », dans lesquels elles choisissent le renfermement afin de mieux se libérer des situations contraignantes qui les assujettissent. La liberté, explique Christine Bard, est à la fois sociale et intérieure, à la fois un mode d’exploration et une possibilité d’expression du soi (15). Comment le renfermement peut-il être à la fois violence et libération pour ces femmes? En quoi permet-il à celles-ci de négocier les rapports de genres? Quelle est la motivation derrière leur choix de renfermement? Comment cette ambiguïté entre renfermement et liberté est-elle représentée dans les écrits des femmes de l’Ancien Régime?
Dans cette optique, nous proposons un atelier où il sera possible de problématiser la question de la violence et du renfermement féminin au dix-septième siècle et de réfléchir à plusieurs formes de libérations paradoxales qu’engendre le thème du renfermement. Nous nous intéressons à différentes formes de renfermement, tel que le mariage et la sphère domestique, les couvents, la maison du père, les refuges, l’identité sexuelle, ou encore les normes et les rapports de pouvoir genrées dans la société.
Cet atelier propose de réfléchir aux deux réalités ambiguës de la situation des femmes à l’époque, soit le renfermement imposé ou bien délibérément choisi. Comment, dans les deux cas, la liberté peut-elle paradoxalement en découler?
Les axes d’analyses possibles, néanmoins non exhaustifs, pourront être :
- Le travestissement femme-homme, qui peut être considéré comme le résultat/ symptôme/ conséquence de l’emprisonnent de la femme dans un environnent hiérarchique et patriarcal où les valeurs masculines dominent. Il peut être vu tel un mouvement libérateur social et intérieur, qui leur permettrait de s’élever à un rang qui ne leur est pas naturellement attribué (Noirot, 101), de fuir la violence domestique, ou encore d’atteindre la liberté amoureuse.
- Le renfermement dans les couvents qui offre l’abstinence; échapper à un statut d’objet sexuel (Bard, 14-15). Choisir Dieu, c’est choisir « de faire l’économie d’une dépendance à l’égard des hommes dans un systèmes d’alliance que les femmes ne commandent pas, et d’un espace domestique qui les assujettit » (Collin, 9-19).
- L’indigence, la marginalité, la souffrance et toutes les violences et dangers que peut rencontrer une femme seule qui viennent motiver son désir de renfermement.
- Les « volontaires » (Regina) qui se retirent au Refuge sans contrainte judiciaire et préfèrent a priori se soumettre à ses règlements et à sa rigidité.
Date limite pour l’envoi des propositions (titre, résumé de 250-300 mots, adresse, affiliation et notice bio-bibliographique de 150 mots) à samantha.carron@ubc.ca et à marianne.legault@ubc.ca avant le 15 janvier 2024.
Le colloque annuel 2024 de l’APFUCC sera en personne. Il se tiendra dans le cadre du Congrès annuel de la Fédération des sciences humaines du Canada et la Fédération n’offre pas de soutien pour des interventions en ligne cette année.
Les personnes ayant soumis une proposition de communication recevront un message des personnes responsables de l’atelier avant le 30 janvier 2024 les informant de leur décision. L’adhésion à l’APFUCC est requise pour participer au colloque. Il faut également régler les frais de participation au Congrès des Sciences humaines ainsi que les frais de conférence de l’APFUCC. De plus amples informations vous seront envoyées à ce sujet. Vous ne pouvez soumettre qu’une seule proposition de communication, présentée en français (la langue officielle de l’APFUCC), pour le colloque 2024.
Ouvrages cités ou consultés:
Bard, Christine, « préface », dans Guyonne Leduc, Travestissement féminin et liberté(s), Paris, l’Harmattan, 2006, p. 13-22.
Butler, Judith, Le trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l’identité [1990], Paris, La découverte, 2006.
Françoise Collin, « Le livre et le code : de Simone de Beauvoir à Thérèse d’Avila », Les Cahiers du Grif, n° 2, 1996, p. 9-19.
Godineau, Dominique, Les femmes dans la société française, 16e- 18e siècle, Paris, A. Colin, 2003.
Gutton, Jean-Pierre, « L'enfermement à l'âge classique », dans Histoire des hôpitaux en France, sous la direction de Jean Imbert, Toulouse, Privat, 1982, p. 162-254.
Harris, Joseph, Hidden Agendas: Cross-dressing in 17th-century France, Tübingen, Gunter Narr Verlag Tübingen, 2005.
Leduc, Guyonne, Travestissement féminin et liberté(s), Paris, l’Harmattan, 2006.
Merlin-Kajman, Hélène, L’Absolutisme dans les lettres et la théorie des deux corps : passions et politique, H. Champion, 2000.
Noirot, Claude, L’origine des masques, mommerie bernez et revennez es jours gras de caresme prenant, menez sur l’asne a rebours et charivery. Le jugement des anciens peres et philosophes sur le subject des masquarades, le tout extraict du liure de la mommerie, Lengres, Jehan Chavveu, 1609, p. 101.
Regina, Christophe, « Brimer les corps, contraindre les âmes : l’institution du Refuge au XVIIIe siècle », Genre & Histoire, n°1, 2007, [http://journals.openedition.org/genrehistoire/97], consulté en ligne le 12 octobre 2023.